La Vérif : l’immigration permet-elle de régler la pénurie de main-d’œuvre? 

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Alors que le Québec vit une importante pénurie de main-d’œuvre, les différents partis ont une vision bien différente de l’immigration. Le Parti québécois (PQ) veut abaisser les seuils du nombre de nouveaux arrivants, tandis que le Parti libéral (PLQ) et Québec solidaire (QS) veulent les hausser. Mais les études se contredisent au sujet de l’incidence de l’immigration sur la pénurie de main-d’œuvre.

Le chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon a dit en point de presse : L’affirmation qu’on entend constamment dans les médias à savoir que la hausse des seuils d’immigration permet de combler la pénurie de main-d’œuvre, elle est factuellement fausse et erronée. Il veut réduire le nombre d’immigrants à 35 000 par année

Son adversaire libérale Dominique Anglade a une tout autre vision : 185 000 chômeurs, 270 000 postes vacants; il est évident, aujourd’hui, que de réduire les seuils, ce n’est pas aller dans la bonne direction. Son parti propose d’augmenter les seuils d’immigration à 70 000 par année, pour répondre à la demande croissante de main-d’œuvre dans la province.

L’immigration aide-t-elle réellement à combler tous les besoins en la matière? Les experts ne s’entendent pas là-dessus.

Une solution pour les besoins immédiats 

Dans une étude de Statistique Canada publiée en juin dernier, le constat est assez clair : les travailleurs immigrants permettent de combler les pénuries dans plusieurs secteurs.

On y apprend que de 2010 à 2019 au pays, ces personnes ont été à l’origine de 84 % de la croissance de la population active totale, et de 55 % de la croissance dans les emplois hautement et moyennement spécialisés.

De plus, les immigrants récents – ceux qui sont au pays depuis 10 ans ou moins – occupent de nombreux postes plus difficiles à pourvoir.

Ils représentaient l’an dernier 8 % de la population active, mais comptaient pour 13 % des employés en restauration et en hébergement, et 10 % des travailleurs dans la fabrication et les transports.

L’agence conclut que l’augmentation des flux d’immigration sera essentielle pour atténuer, du moins en partie, les effets du vieillissement de la population canadienne sur le marché du travail.


Par ailleurs, au Québec, près d’un emploi sur cinq est occupé par un immigrant, selon l’Institut du Québec. C’est supérieur au poids démographique de ces personnes dans la province.

Un effet à long terme négligeable?

L’immigration peut donc soulager les effets immédiats de la main-d’œuvre dans certains secteurs ciblés.

Dès 2016, un rapport fédéral du Conseil consultatif en matière de croissance économique recommandait d’augmenter le nombre d’immigrants accueillis annuellement au pays à 450 000 pour contrer les effets du vieillissement de la population et répondre aux enjeux de main-d’œuvre.

Le gouvernement Trudeau a d’ailleurs adopté cette cible pour 2024. Tout juste avant la pandémie, le Canada avait accueilli plus de 341 000 résidents permanents.

Mais dans un rapport soumis en mai dernier par Pierre Fortin au ministère de l’Immigration, de la Francisation et de l’Intégration du Québec, l’économiste expose que l’augmentation du nombre d’immigrants aurait une incidence presque nulle à long terme.

Pierre Fortin fait valoir que les immigrants augmentent la population active, mais qu’ils vont aussi faire grimper la demande pour les biens et services. Ils auront des besoins en éducation ou en santé et vont consommer, et, donc, il faudra davantage de travailleurs pour répondre à leurs besoins. 

Dans son rapport, l’économiste souligne aussi que le vieillissement de la population ici est déjà trop prononcé pour être contré de façon importante par une hausse des seuils d’immigration .

Poids démographique du Québec

Une chose est certaine : avec les seuils actuels promis par les différents partis politiques, le poids démographique du Québec au sein du Canada est voué à diminuer.

Pour le maintenir à 23 % – qui est son poids actuel, selon le dernier recensement –, il faudrait accueillir plus de 100 000 immigrants dans la province l’an prochain, en tenant en compte la cible d’environ 450 000 immigrants au fédéral.

La proposition du PQ d’accueillir 35 000 immigrants représenterait 8 % du total des résidents permanents accueillis au pays l’an prochain. À l’autre bout du spectre, les 70 000 immigrants promis par Dominique Anglade augmenteraient cette proportion à 16 %. 

Avec la collaboration d’Olivier Bachand et Nathalie Lemieux

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