Affaire François Mankabou: Attention à la justice populiste !

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Qui se rappelle de son cours de philosophie intitulé « individu et société » ? (Clin d’œil à Mme Ndiaye du lycée de Mbacke mdr). Pour nous rafraîchir la mémoire, ce cours nous renseigne sur le ou les rapports qu’entretient l’individu face à la société à laquelle il se dit appartenir, sur la naissance de la notion de société et en parallèle l’Etat en tant que tel. C’est ainsi que l’on a croisé le chemin de différents auteurs et théoriciens qui ont essayé de théorisé les origines de ces deux entités. Jean Chaque Rousseau et Thomas Hobbes entre autres, respectivement dans Du contrat Social et Le Léviathan, ont mis en avant la théorie de l’état de nature. Selon cette dernière, l’homme se trouvait dans un état sauvage, se manifestait comme un loup pour son prochain, suivait ses propres règles, se faisait justice lui-même…par la suite, constatant que cet état ne peut pas continuer, les hommes se sont convenus de mettre en place une structure qui les rassemble et les régule tous. Cette même structure se verra confier des pouvoirs dont les hommes se sont eux-mêmes dessaisi. C’est l’état de société : des règles sont établies, la justice individuelle et populaire est bannie, la loi du plus fort balayée… Maintenant tout est régulé par cette société qui dispose de composantes chargées spécifiquement de gérer et de restaurer l’ordre. Sur ce, on constate progressivement la venue des trois pouvoirs que l’on connait à savoir l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Puis leur séparation pour éviter un abus ou une collision se restaure, c’est tout le sens des travaux de Montesquieu dans De l’esprit des lois. Selon lui, le pouvoir doit arrêter le pouvoir.

         On en est là aujourd’hui. Dans tous les systèmes politiques du monde, ou presque, le principe de la séparation des pouvoir est en vigueur. Cela implique que l’exécutif s’occupe de ses affaires de gestion, le législatif se contente de légiférer et d’évaluer la politique de l’exécutif et le judiciaire brandit le bâton de la justice. Sans cette clarification des fonctions et la limitation des pouvoirs, tout aurait été cacophonie et anarchie. Même si, tout n’est pas blanc ou noir….anyway passons… !

         L’affaire François Mankabou suscite beaucoup de remous, déchaîne les passions, attise les émotions, donne libre cour aux cœurs de s’exprimer et aux sentiments de s’extérioriser. Les théories et les versions fussent de partout et nulle part, chacun y va de sa propre analyse et des termes et expressions plus durs les uns que les autres. Ce qui est une situation dangereuse et si on ne fait pas attention, les répercussions peuvent être cinglantes et de tout ordre.

         Selon la version officielle, quoi que démentie vigoureusement par une partie de l’opinion, ce monsieur mis aux arrêts aurait tenté de se suicider en fonçant direct vers un mur. C’est ce que le procureur de la république a soutenu lors de sa conférence de presse. Une autre version, très défendue, vient contredire celle du procureur en affirmant le monsieur en question aurait subi des maltraitances et de la torture. Ce qui est totalement interdit par la convention de Genève.

         C’est cette pluralité de versions contradictoires qui pose problème de savoir à quel saint se vouer. Même si la majorité croit à la dernière du fait peut-être des antécédents notés avec la justice et l’absence de franchise que fait preuve l’Etat depuis un certain nombre d’années sur des dossiers croustillants, pouvant même ne pas avoir de rapport avec l’apparait judiciaire.

         Quoi qu’il en soit, il est très dangereux de faire recours à une justice populiste car, vue la tournure que prend les évènements, des personnes ont déjà été déclarées coupable par certains alors même que l’enquête n’est pas encore bouclée. Il est compréhensible de penser que cette même enquête ne serait qu’un écran de fumée pour alimenter le mensonge et la manipulation dont l’Etat est coutumier. On a été témoin de pas mal de décès non élucidés à ce jour qui aurait été perpétrés par des commis de l’Etat et dont les coupables courent toujours sans être inquiétés. Et dans chacun de ces cas, l’Etat promet de faire jaillir la vérité et d’appliquer la sentence nécessaire mais à la fin de la journée, que dalle ! Ces expériences font que la plupart ne croit pas en cette justice et demeure perplexe. Quoi qu’il en soit, cela ne doit pas être une raison de dire le droit soi-même. Tout l’appareil n’est pas pourri et on ose espérer qu’il reste des magistrats intègres et dignes en service.

         Etant donné que le ministre de la justice a déclaré officiellement l’enquête ouverte, que le procureur de la république a fait état d’une vidéo de surveillance qui aurait filmé toute la scène, que les avocats des parties connaissent leur boulot et feront valoir leur droit de prendre connaissance de cette vidéo puisqu’elle un élément de preuve, la vérité éclatera assurément.

         En outre, le discours et la distinction ethniques qui prennent de l’ampleur de plus en plus sont carrément à éviter. Même si le défunt fait partie d’un groupe ethnique, ici chacun est issu de quelque part, cela ne doit pas être mis en avant. Monsieur Mankabou est avant tout un sénégalais, un soldat qui a été sous les drapeaux en plus. Donc ce serait vraiment dommage et impertinent de convoquer son appartenance ethnique pour étayer des arguments fallacieux qui n’ont pas lieu d’être. L’ethnicisme est dangereux pour une nation, il divise. Et dans ces moment-là, on a besoin plus que tout d’un discours rassembleur et fédérateur.    

         Certes, on a le droit de réclamer la justice pour monsieur François Mankabou mais on est pas du tout en mesure de la rendre. La justice est rendue pour le peuple mais pas par le peuple.

Chaleureuse condoléances à la famille de la victime !

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