Situé à une quinzaine de kilomètres de Mbacké, Kael fut, jadis, une localité dynamique à tous points de vue. De cette époque florissante d’ancien canton, il ne reste que des souvenirs entretenus par quelques nostalgiques.

Canton dynamique, pôle économique et social à l’époque, Kael a vécu de beaux jours par le passé, particulièrement sous l’administration de Cheikh Yaba Diop. Attractive, avec un marché dynamique et un commerce florissant, la localité a abrité de grandes firmes de commerces. Cette situation a créé, avec l’arrivée des commerçants libanais et syriens dans les années 1960, un embryon de développement du canton de Kael.

De la place du marché, pleine de monde, au domicile du chef de village, il n’y a qu’une rue directe qui traverse le village de part en part. La mise parfaite en cette journée pluvieuse, El hadji Demba Diallo qui marche sans appui vient juste de lancer la journée de consultation gratuite au poste de santé. L’allure fière et la voix rocailleuse, les traits physiques de cet octogénaire témoin de son temps et de l’histoire de la ville de Kael ne reflètent pas son âge. « À l’origine, il n’y avait que le canton de Lah, distant de 15 km de Kael. Le canton de Kael est né de la volonté de l’administration coloniale de vouloir récompenser un valeureux tirailleur qui s’est illustré de fort belle manière lors de la Seconde Guerre mondiale : Cheikh Yaba Diop », explique le chef de village.

Descendant de la famille royale de Lat Dior Diop, Cheikh Yaba était l’incarnation de l’engagement, de la noblesse et de la témérité. Il s’est volontairement engagé pour faire le service militaire à la place de Serigne Mouhamadou Moustapha Mbacké qui était pressenti. De retour au Sénégal, après s’être courageusement distingué sur le champ de bataille et à travers un témoignage de ses pairs sur ses valeurs et vertus guerrières dont il avait fait montre, il a reçu les honneurs de la métropole. Et pour le récompenser de son dévouement, les autorités coloniales ont demandé à son guide et parrain, Serigne Touba, une nomination à un poste qui lui ferait plaisir. L’aval de Serigne Touba obtenu, Cheikh Yaba Diop opta pour le poste de chef de canton et le lui fit savoir. C’est ainsi que, sans une grande éducation scolaire, son vœu fut réalisé. Pour accéder à sa volonté, le vaste canton de Lah fut subdivisé en deux. Ainsi est né le Canton de Kael dont il fut le chef. Il demeure le plus connu des chefs de canton de Kael qu’il dirigea avec une grande probité, une autorité sans conteste jusqu’à sa retraite, selon El hadji Demba Diallo.

De Samba Ndoungou à Cheikh Yaba Diop, des personnages historiques

 Les premiers habitants de Kael étaient des Socé, ensuite il y a eu les Peuls, puis les Wolofs et les Sérères. Parmi les habitants de Kael, il y avait une personne dotée d’un charisme et d’une popularité extraordinaire qui répondait au nom de Samba Ndoungou, révèle le chef de village. Cette popularité était juste un don de Dieu, raconte notre interlocuteur. C’est pourquoi son nom est lié à celui du village. Ce personnage n’était ni un guerrier ni auteur de hauts faits, mais il jouissait seulement d’une popularité à un point jamais égalé pour une personne. « La popularité de Samba Ndoungou a contribué à l’aura de la localité, mais la personnalité de Cheikh Yaba Diop n’est pas étrangère à cette notoriété de Kael dont les activités économiques rayonnaient dans toute la région de Diourbel », souligne-t-il.

Sou son magistère, le canton de Kael comptait parmi les plus en vue dans le pays. Cheikh Yaba Diop était un éminent disciple de Serigne Touba mais aussi un grand ami du Président Senghor qui l’appréciait pour plusieurs raisons dont son passé de tirailleurs qu’ils avaient en commun. En 1960, après l’indépendance, Senghor n’a ménagé aucun effort pour amener son ami en France, afin qu’il rencontre le Général de Gaulle. Le but était de lui narrer les hauts faits d’armes de Cheikh Yaba Diop, fait savoir le chef de village. Toutes ces choses ont contribué à rendre populaire Kael et son chef de canton.

  Les différents chefs de canton

Après Cheikh Yaba Diop, Kael a connu d’autres administrateurs dont les Sous-préfet, avec l’Acte 3 de la décentralisation. Cheikh Yaba Diop fut le premier administrateur du canton de Kael. Il a été remplacé, à sa retraite, par un nommé Matar Ndoumbé Diop qui a dirigé Kael pendant un an et demi, avant qu’intervienne la réforme de 1960 commandée par l’accession du Sénégal à l’indépendance

La concession de Cheikh Yaba, un patrimoine culturel de Kael

À Kael, une imposante concession se dresse au centre du village. Elle fait face à une grande esplanade qui sert de « penthie » (place publique). Ouverte vers l’est, la grande concession constitue une attraction pour le visiteur. Elle est clôturée par un grand mur non peint. Trois grands portails fermés constituent les portes d’entrés. Depuis l’extérieur, on peut observer les toitures de deux grandes cases et une importante végétation à l’intérieur qui contraste avec les deux grands arbres secs, visibles à la devanture de la concession du plus populaire chef de canton de la localité. Les dimensions de la concession dénotent, de l’avis d’El hadji Demba Diallo, de l’importance de l’autorité qui habitait ces lieux. C’est à partir de là qu’il administrait le canton, explique-t-il. C’est de son vivant que son fils, Samba Yéla Diop, ancien Ministre de l’Hydraulique sous Abdou Diouf, a reconstruit et clôturé la maison de son père. « Il a honoré son père qui reste une fierté pour tous les habitants de Kael. Plusieurs personnalités du Sénégal ont visité cette concession. Les membres de l’Association des chefs de canton du Sénégal y ont séjourné. Serigne Abdou Lahad Mbacké, troisième Khalife général de la communauté mouride, l’a visitée. C’était pour voir le cheval de race « Nguelemou » qui ressemblait à celui avec lequel Serigne Touba voyageait à travers le pays », confie le Chef de village. La descendance de Cheikh Yaba Diop veille aussi sur cette concession qui est un patrimoine culturel de Kael.

Les « Mbanars » ou tumulus de Kael, l’attractivité du moment

Des fouilles archéologiques ont mis au grand jour, à Kael, des tumulus ou « Mbanars ». Selon le chef de village, il pourrait s’agir là des premiers habitants qui étaient des Socé et Sérère qui ont la culture des « Mbanars » : les défunts sont enterrés avec tous leurs biens matériels. Ces « Mbanars » sont localisés entre les villages de «Tainabé et Thiog ». Des chercheurs étaient venus sur les lieux pour des recherches archéologiques, il y a quelques années, et ils avaient exhumé les restes d’une civilisation ancienne. En effet, un document reçu de l’actuel Sous-préfet de Kael confirme cette découverte suite aux recherches archéologiques dans la zone des tumulus du Sénégal. Dans la région choisie, la grande majorité des sites archéologiques avérés était constituée d’une seule catégorie : les monuments funéraires en forme de tumulus de sable ou « Mbanars » en wolof. L’équipe archéologique de Sonja Magnavita, de la Kaak (Kommission fur Archaologie Aubereuropaisher Kulturen), et d’Ibrahima Thiaw, du Laboratoire d’archéologie de l’Ifan (Université de Dakar), ont, dans un rapport, fait état de la découverte, à 1,7 km au sud de Kael, d’un tumulus après prospection topographique d’une surface de 3,75 ha, un tumulus de 50 m de diamètre et 2,80 m de hauteur, et d’un autre plus petit et de faible élévation à 220 m au nord-est du premier lors des travaux archéologiques menés dans le département de Mbacké en 2012 et 2013. Ces tumulus sont des monuments funéraires en profondeur. Par la télédétection souterraine issue de la géophysique, les chercheurs ont pu, selon le document, détecter des sites d’habit archéologique.

El hadji Demba Diallo, le gardien de la mémoire

Né en 1940 à Kael, témoin de l’histoire et de l’évolution de l’époque florissante à ce jour, Elhadji Demba Diallo, l’actuel chef de village, a passé une importante partie de sa jeunesse dans la concession de Cheikh Yaba Diop, alors chef de canton. « Alors que j’étais un peu âgé, c’est lui qui m’a fait un jugement supplétif avec une date de naissance en 1947 pour que je puisse entrer à l’école française construite en 1953 et ouverte en 1954. Je fis partie des premiers élèves de l’école de Kael ou j’ai obtenu mon Certificat d’études primaires élémentaires (Cepe) en 1960 », explique le vieil homme. À 81 ans, Elhadji Demba Diallo retient de Cheikh Yaba le souvenir d’un homme digne, qui incarnait des valeurs de droiture. « Il avait du respect pour tout le monde. Il avait beaucoup de courage et n’avait pas peur de vous dire ses vérités. Il m’a élevé, m’a circoncis, m’a éduqué, m’a fait entrer à l’école française, m’a trouvé une épouse et m’a fait entrer à la Sodeva. Une personne qui a tant fait pour voir, vous ne pouvez pas l’oublier. C’est pourquoi je ne cesse de prier pour le repos de son âme. En dehors d’Allah, c’est à lui que je dois tout », soutient le chef de village. À sa connaissance, le premier chef de village de Kael sous Cheikh Yaba se nomme Mor Ndao. Ensuite, viennent Baye Cheikh Seck, Ousseynou Seck, El hadji Mor Gningue. Et lui occupe ce poste depuis trois ans et est en même temps le Président de l’Association des chefs de village de la commune de Kael. Il est également le porte-parole de l’Association départementale des chefs de village.

Kael renaît avec les nombreuses infrastructures

Il y a quelques années, Kael avait perdu de sa superbe à cause de l’enclavement et de l’accès difficile à l’eau. Aujourd’hui, la commune compte 39 villages officiels et s’étend sur une superficie de 161,20 km2, pour une population de 10 475 âmes. Le village dispose d’une bonne fourniture en électricité et en eau potable grâce à l’érection d’un nouveau forage. Samba Yéla Diop, alors Ministre de l’Hydraulique, a inauguré, en 1983, le premier château d’eau. Depuis, il y a un nouveau forage et le château d’eau est en construction.

Une école de formation professionnelle qui ne fonctionne plus

En dehors de l’école pour les cours d’enseignement général, Kael disposait aussi d’un centre de formation et de perfectionnement pour les métiers de maçonnerie, de menuiserie métallique et ébéniste, entre autres corps de métiers. Les jeunes qui y étaient admis venaient de toutes les localités du pays. Aujourd’hui, cette école est tombée en ruines au moment où les jeunes ont encore besoin de formation. Pour Elhadji Demba Diallo, il faut remettre en état l’école et la route. « En effet, l’axe routier qui nous relie à la nationale 3 est longue de 3,5 km et date de 1964. Nous attendons toujours la réalisation des promesses de l’État pour sa réalisation. La commune dispose d’un poste de santé avec une maternité, une case des tout-petits, une école primaire, un collège d’enseignement supérieur, un poste de Gendarmerie.

Kael, un village de 500 habitants

« La population du village est passé de neuf carrés au moment ou je prenais en main les destinées de la cité à 70 carrés et près de 500 habitants », a fait savoir El hadji Demba Diallo. L’agriculture et l’élevage, sont les principales activités, mais le commerce y a connu une ère de prospérité avec l’installation des commerçants libanais et syriens. Actuellement, le village de Kael connait un brassage ethnique sans précédent. Peuls, Wolofs, Sérères y vivent en parfaite harmonie. Parmi les dignes fils connus de Kael, figurent, en dehors du populaire Samba Ndoungou et du charismatique chef de Canton Cheikh Yaba Diop, l’ancien Ministre de l’hydraulique sous le régime socialiste, feu Samba Yéla Diop, Moussa Sakho, le Ministre de l’Enseignement technique et de la Formation professionnelle sous le régime libéral, Amadou Kâ, ex Député, ancien Maire de la commune de Mbacké, El Bachir Sow, ancien journaliste du quotidien national « Le Soleil », El hadj Bâ,  ancien Directeur de l’école et premier Maire de la commune de Kael, Bassirou Djigal, Président de communauté rural, Mamadou Ka, Inspecteur de l’enseignement, etc.

« Xale amatul »

Par Alassane Aliou Fèré MBAYE

Sèchement, je demandai à un très jeune ami, chaud lapin précoce, s’il sait faire usage d’un préservatif. Ses conquêtes féminines me semblaient plus rompues aux plaisirs de l’amour que lui qui en tirait plutôt orgueil. Sa faconde hâbleuse témoignait de son aventureuse fougue. Face à mon impertinence, il était surpris mais essayait toujours d’afficher la mine de l’adolescent qui s’est émancipé… par les luxurieux plaisirs explorés. La découverte du doux secret des adultes donne des ailes aux plus timorés des mâles ! « Je n’en use jamais parce que mes copines prendraient cela pour un manque de confiance en elles et en leur fidélité. Tout ce que je veux savoir se trouve dans mon smartphone », me répondit-il, le ton détaché, en me pointant son portable comme pour narguer le néanderthalien qui, lui, a appris à utiliser le condom en classe. Il paraît que certaines écoles ne le font plus. C’est une erreur. Le procédé pourrait cependant être mieux pensé.

Cette assurance orgueilleuse du jeune « flingueur » était plein de candeur et révélait, j’en étais persuadé, l’absence d’une éducation sexuelle et une mauvaise appréciation des « périls de la chair ». Les inévitables interférences technologiques, qui rétrécissent le cycle de formatage de l’enfant et de l’adolescent, devraient inciter les parents à adopter une nouvelle approche et à enrichir le lexique des « expressions permises » avec leur progéniture. Le temps de maturation de cette dernière s’est sensiblement réduit. Il convient donc d’avoir la prompte intelligence de nourrir l’esprit de la jeune âme pour en faire un bouclier face, par exemple, aux assauts du tumultueux « peñc virtuel » (Internet) où s’époumone le tuteur virtuel.

Je préfère, à la fois, vanter les vertus de l’abstinence et apprendre à mon fils comment utiliser un préservatif que de le laisser dans cette « rue » à la recherche de réponses à son questionnement légitime. Il faut affronter la violente réalité d’un monde qui méprise les convenances. Se calfeutrer obstinément dans sa bulle de pudicité, c’est déléguer à l’inconnu son autorité parentale et d’occulter la réalité. L’enfant doit améliorer sa connaissance du monde sur les nouveaux espaces. Mais, il ne doit pas y découvrir le monde.

PETIT MÉTIER, GROS PROFIT

YOUSSOUPH SADIO DIT CHINOIS

Du journalisme à l’aviculture

Le journalisme mène à tout, a-t-on coutume de dire. C’est le cas de celui que tout le monde appelle « Chinois » dans le Balantacounda. Youssouph Sadio à l’état civil, passionné des médias, s’est détourné de ce métier pour investir dans l’aviculture et le maraîchage. Et il s’en sort bien…

Son nom à l’état civil, c’est Youssouph Sadio. Mais, à Goudomp, tout le monde l’appelle « Chinois ». Un surnom qu’il tient après avoir fréquenté des hommes de l’Empire du milieu qui s’étaient installés dans son village et avaient fini par tisser des liens d’amitié avec son papa. Tout petit, toujours flanqué de ses Asiatiques, les femmes du village l’ont affublé du surnom « Chinois » qu’il porte fièrement aujourd’hui. À Goudomp, tout le monde connait cet ancien journaliste qui a fait les beaux jours de la presse dans son Balantacounda. Influencé par des aînés qui tenaient un journal au lycée, il reprit le flambeau avec quelques camarades du secondaire dont Pape Diémé, leader de Pastef à Goudomp décédé la semaine dernière, et un certain Doudou Seydi, devenu ingénieur aéronautique. Ce fut quand les « précurseurs » se retrouvèrent à Dakar après le bac. Parmi ces aînés apprentis journalistes, certains ont réussi à faire leur trou dans le métier. À l’instar de Nfally Sadio, Chargé de communication de la Croix-Rouge au Sénégal, et de Daouda Mané, Directeur des Rédactions du « Soleil ». Il y avait également, dans cette bande, Saliou Kandé, devenu inspecteur d’Education. À travers le journal que la bande d’amis tenait au lycée, il leur arrivait même de filer des informations sur tout ce qui se passait à Goudomp à la Rts de Ziguinchor.

« Chinois » a ainsi fait les beaux jours de la Rts, Sud Fm et Lamp Fm. Dans cette dernière entreprise de presse, il avait accepté une correspondance à Bissau pendant cinq longues années. À la Rts Sédhiou, une décision de la rédaction centrale est venue mettre fin à cette expérience. Un licenciement dont il a été victime avec d’autres pigistes de la boîte. Aujourd’hui, tout ceci constitue un mauvais souvenir. L’homme s’est retrouvé dans un autre univers, loin des médias. Ce que l’on peut qualifier d’appel de la terre. Aviculteur, il s’active également dans le maraîchage. « J’ai toujours aimé le journalisme, mais je n’arrivais pas à satisfaire les besoins de ma famille. C’est un métier aléatoire surtout si on a été formé sur le tas et sans diplôme. C’est un peu difficile. Quand on t’entend à la radio, les parents ou amis pensent que tu es bien à l’aise alors que tu es dans des difficultés. Je ne regrette pas d’avoir fait le métier. Cela a été une belle expérience et m’a permis d’avoir un bon carnet d’adresses », confie Youssouph, rencontré dans son village, Baconding, à presque un km de Goudomp.

En cette matinée à Baconding, la pluie menace. Le ciel s’assombrit. Claudiquant, « Chinois » a les yeux rivés sur le travail de ses jeunes employés. Il puise l’eau et vérifie si l’espace aménagé pour ses poussins est bien nettoyé. L’homme est méticuleux. Malgré son handicap physique, l’ancien confrère dirige avec rigueur ses activités champêtres. À côté de son poulailler, il entretient un jardin où il cultive de la patate douce et d’autres variétés agricoles. Teint clair, 43 ans, Youssouph Sadio regrette de n’avoir pas très tôt entrepris dans l’aviculture et le maraîchage. Aujourd’hui, il vit mieux que quand il s’activait dans le journalisme qui reste toujours sa passion. Grâce à ses activités, il peut se retrouver avec un bénéfice qui tourne entre 700 et 800 mille FCfa. L’ancien confrère a le plus gros de ses clients à Bissau où il se rend fréquemment. Le maraîchage lui procure particulièrement d’importants revenus avec la culture de la patate, du gombo et autres. « Ma situation de handicap m’a posé beaucoup de problèmes. À Goudomp, l’accès aux financements n’est pas facile. Un projet de Papsen (Programme d’appui au Programme national d’investissement de l’agriculture au Sénégal) me promettait un accompagnement. Le Directeur m’avait appuyé en me remettant cinq sacs d’engrais. Il était satisfait de mes premières récoltes dans le maraîchage et m’avait promis de m’aider avec un financement que j’attends toujours (…) », dit-il, ne quittant pas des yeux ses jeunes employés. À l’écouter, on comprend mieux sa passion pour le journalisme. En effet, l’ancien reporter s’exprime aisément en français et parle couramment plusieurs dialectes du terroir. « Je conseille aux jeunes de croire en eux. Chacun d’entre eux à un potentiel. Ce qui reste, c’est le côté mental. Si les études ne marchent pas ou qu’un recrutement dans la Fonction publique tarde, il faut qu’ils entreprennent », conseille l’ancien journaliste aujourd’hui tout heureux dans son univers agricole. Une autre vie après celle des médias…

Samba DIAMANKA (Correspondant)

AU CŒUR DU ARCHIVES DU SOLEIL

VOL DE 5 MILLIONS DANS UN MAGASIN

Le voleur perdu par son portefeuille

Abdou Karim Dièye n’est pas un voleur très chanceux. Après avoir fait main basse sur cinq millions de FCfa dans un magasin de riz à Mbour, il a été alpagué dans la région de Fatick grâce à un cliché photo trouvé dans son portefeuille.

Après avoir bien planifié son forfait, Abdou Karim Dièye a vu son monde s’écrouler suite à un petit détail qui a mis les gendarmes sur sa piste. Le sieur, natif de Diourbel, avait fait le plus difficile en s’introduisant, incognito, le vendredi 13 janvier 1995, dans le magasin de Mame Gor Sèye et Dame Sèye, deux frères commerçants grossistes à Mbour. Profitant d’un moment d’inattention de Youssou Sèye, frère cadet de Mame Gor et Dame chargé de la vente dans la boutique, il s’était caché entre les sacs après avoir fait semblant d’acheter du riz. Il a pris son mal en patience et y est resté jusqu’à l’heure de la fermeture puisque d’habitude, les vendredis, les commerçants fermaient boutique pour se rendre à la prière. Karim a alors profité de ce moment pour s’emparer de la recette évaluée à 5 millions de FCfa par les commerçants grossistes et 3 millions, selon lui.

Une fois saisi, le commandant de la brigade de Mbour s’est dépêché sur les lieux du vol pour constater les faits. Il découvre, après un examen minutieux, un portefeuille appartenant au voleur. À l’intérieur se trouvaient un extrait de naissance, deux photos d’identité, plusieurs adresses et numéros de téléphone. L’enquête diligentée par Mamadou Alioune Diallo, chef de la brigade, a permis de rencontrer le chauffeur que le présumé voleur avait loué pour le conduire à Kaolack après son forfait. Le chef de la brigade de gendarmerie, convaincu qu’il tenait la bonne piste, a reçu l’autorisation du procureur de Thiès de poursuivre les investigations. Sur ces entrefaites, il se rendit ensuite à Diourbel puisque l’extrait de naissance trouvé dans le portefeuille révélait que Karim Dièye y était né. La seule information qu’il a obtenue à la mairie est que le père du présumé voleur était garde républicain à Diourbel et n’y vivait plus. Après avoir vainement cherché des renseignements auprès des différentes familles Dièye de Diourbel, le gendarme enquêteur s’était rabattu sur un cliché négatif trouvé dans le portefeuille appartenant à l’auteur des faits et qu’il avait fait reproduire. Après examen minutieux de la photo, le commandant Diallo avait découvert que le jeune homme portait un bracelet dont les initiales qui apparaissaient à peine laissaient entrevoir PMF. Parmi les noms trouvés dans le calepin figurait celui de Pape Makhary Fall demeurant à Fatick.

Le commandant s’est transporté à Fatick à la recherche de ce dernier. Une fois sur place, il avait retrouvé et interrogé PMF qui nia avoir participé aux faits. Lorsque la photo lui a été présentée, il identifia Abdou Karim Dièye demeurant au quartier Hersent, à Thiès. PMF informa le commandant qu’ils s’étaient rendus chez un marabout domicilié à Touba Sanokho, sur la route de Passy. Le commandant qui avait flairé que le présumé voleur pouvait se cacher chez le marabout, avait alors foncé à Touba Sanokho. Ces efforts et sa pugnacité furent récompensés. Dans la cour de la maison, il a trouvé Abdou Karim Dièye déguisé en vrai talibé. Il était loin de se douter que sa course allait prendre fin si rapidement, lui qui comptait sur le fruit de son larcin et l’aide de son marabout pour aller en Gambie et rallier l’Europe…Le commandant, après s’être présenté, l’arrêta pour vol. Surpris, Abdou Karim Dièye lui a demandé s’il était un djinn. Ce dernier lui répondit qu’il était leur chef.

Karim reconnut les faits et conduisit le commandant à la chambre où il gardait le reste de l’argent, soit 1.710.000 FCfa. Il expliqua au commandant avoir utilisé une bonne partie du butin pour se payer des costumes à Dakar et faire la fête. Tous les soirs, a-t-il avoué, il louait un taxi pour se rendre dans les night-clubs de la capitale et ne retournait dans la cour du marabout que le lendemain matin, de bonne heure.

Samba Oumar FALL (Source El Hadji Ndiaye, « Le Soleil » du 21 janvier 1995)

CITATION DU JOUR

« La conscience ? Elle n’empêche jamais de commettre un péché. Elle empêche seulement d’en jouir en paix ».

Théodore Dreiser

ARRET SUR IMAGE

Malgré la prépondérance des religions révélées, certaines pratiques socioculturelles demeurent ancrées dans le quotidien des Sénégalais. Cette cérémonie de libation, « Ndeup », en est la parfaite illustration. Lait, sucre, biscuit, argent, une belle succulence pour s’attirer les faveurs des mânes.

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