De « fausse bonne idée » à « favorable » : comment l’exécutif s’est rallié à la levée des brevets sur les vaccins

Dans le sillage de Joe Biden, Emmanuel Macron s’est dit jeudi 6 mai « tout à fait favorable à ce que la propriété intellectuelle soit levée » sur les vaccins anti-Covid. Une décision qui tranche avec ses prises de position antérieures. De fait, il s’était plusieurs fois montré réticent à la levée des brevets, lui préférant les dons aux pays démunis, notamment via le programme Covax. « Le sujet, nous le savons aujourd’hui, n’est pas celui-là. C’est celui du transfert de technologie, de la mobilisation des capacités de production », avait-il ainsi déclaré le 23 avril.

En visite ce matin dans le premier grand vaccinodrome parisien, le chef de l’Etat a précisé : « Oui nous devons évidemment faire de ce vaccin un bien public mondial ». Mais il a souligné d’emblée que la priorité à court terme était « le don de doses » et « de produire en partenariat avec les pays les plus pauvres »« Ce que j’ai dit simplement (auparavant, NDLR), c’est qu’aujourd’hui, vous avez un goulot d’étranglement, ce qui rend difficile l’accès au vaccin », a-t-il expliqué.Le vaccin doit-il être un bien public mondial ?

« Si cela avait une utilité, nous le ferions immédiatement »

Quelques heures avant l’annonce de Washington, le secrétaire d’Etat chargé du Numérique Cédric O déclarait encore qu’une telle décision ne serait pas la panacée. Au contraire, « il est même possible que ce soit une fausse bonne idée »,avait-il lancé au Sénat.

Une position défendue par d’autres ministres. Outre Cédric O, la ministre déléguée chargée de l’Industrie Agnès Pannier-Runacher raillait ainsi sur Twitter les partisans de la levée des brevets, le 17 mars, dans un long fil de messages. « Il suffirait donc de lever les brevets des labos pour que des doses de vaccins tombent du ciel par millions ? », grinçait-elle.

Dans la même veine, le secrétaire d’Etat chargé des Affaires européennes Clément Beaune déclarait ainsi, le 30 mars, que « si lever les brevets des vaccins avait une utilité, nous le ferions immédiatement ! »

Avant de retourner sa veste, ce jeudi. Plein d’enthousiasme, il écrit : « Tant mieux, les Etats-Unis se rallient à ce que la France et l’Europe défendent depuis un an : faire du vaccin un bien public mondial ! »

Un revirement moqué par la gauche

Cette prise de position a aussitôt été dénoncée comme un revirement « hypocrite » par la gauche française qui réclamait un telle mesure depuis des mois.

Contacté par nos confrères du « Parisien », le ministère de l’Industrie a tenté de relativiser les propos d’Agnès Pannier-Runacher : « Nous n’avons jamais dit qu’il ne fallait pas lever les brevets, nous disons simplement que ça ne résoudra pas les problèmes du moment, qui ne reposent que sur l’accroissement des capacités de production dans le monde. Il faut aussi desserrer les mailles du filet des pays qui ont instauré des contrôles aux frontières et qui filtrent les composants entrant dans la composition des vaccins. Les Etats-Unis nous rendraient davantage service, aujourd’hui, en agissant en ce sens. »Faire des vaccins un bien public mondial ? « Une idée généreuse mais déconnectée de la réalité »

L’opposition de gauche qui avait réclamé la levée des brevets a immédiatement vilipendé le changement de pied de l’exécutif. « Ils ont zéro volonté, et maintenant que Biden dit “oui”, Macron et sa cour font les toutous. Vive la France », raille le député « insoumis » François Ruffin.

Adrien Quatennens, numéro 2 de LFI, se fait tout aussi critique. « Hypocrite Emmanuel Macron ! Vous vous êtes battu contre cette levée des brevets sur le vaccin pour servir vos amis du fric et des laboratoires pharmaceutiques ! La France a voté CONTRE à l’Organisation mondiale du Commerce ! Biden vous inspire ? Parfait : taxez les riches ! »

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