Covid-19 : Les révélations des personnes du 3e âge sur les vaccinations au Sénégal

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Parmi les plus exposées au Covid-19, les personnes du 3e âge ont changé leur quotidien. Pour éviter de choper la maladie, beaucoup ont préféré se confiner. Aujourd’hui, après avoir reçu leurs doses de vaccin, la vie reprend petit à petit ses droits pour ses seniors.

«Avec cette deuxième dose du vaccin, je sens que c’est une nouvelle vie qui commence», sourit Moustapha Kâ. A 60 ans, l’homme s’apprête à recevoir sa seconde vaccination. Assis sur une chaise, à l’intérieur d’un centre de vaccination situé au populeux quartier de la Patte d’oie, l’homme fourré dans un kaftan bleu, un bonnet sur la tête, a hâte de recevoir sa dose et songe déjà à la vie d’après. Pour cet ancien comptable, le vaccin signifie surtout l’espoir d’un retour à la vie normale. «Une petite piqûre, mais un espoir immense de retrouver une vie normale. Je n’ai pas hésité. C’est la seule solution pour arrêter le Covid», explique l’homme. Surtout que le fameux virus a totalement mis un coup d’arrêt à ses activités. «Avec cette pandémie, mes habitudes ont changé. Me sachant très exposé, j’ai préféré me confiner. J’ai arrêté d’aller au grand’place de notre quartier, mais également à la mosquée. C’était la même chose pour mes amis. Nous en étions arrivés à n’entretenir qu’une relation téléphonique. Nous ne nous voyions presque plus», confie tristement le sexagénaire. Maintenant, avec la prise du vaccin, loin de la peur d’être infecté par le virus, le vieux Kâ a repris ses activités longtemps mises en pause à cause du Covid-19. «Maintenant, il n’y a plus cette crainte permanente qui m’habitait. D’ailleurs, la semaine dernière, j’ai retrouvé mes amis au niveau de notre point de rencontre. Je suis même allé à la mosquée, mais en respectant les gestes barrières», assure Moustapha Kâ. Comme Moustapha, ils sont aujourd’hui 308 000 à avoir achevé leur parcours vaccinal pour quelque 600 000 doses reçues de la Chine, de l’Oms et de l’Inde. Un début de soulagement pour les papys et mamys qui peuvent enfin espérer une vie normale.

«La psychose n’est plus là. Je ne fuis plus les jeunes»

Dans les ruelles animées de la Médina, les riverains ont déserté les maisons. Avec la légère brise qui souffle par intermittence, chacun essaye de s’occuper comme il peut. A la rue 11, sous un arbre à palabre, des personnes du 3e âge, réunies autour d’une table, jouent à des jeux de dames. Ici, l’effervescence est à son summum. A haute voix, ces seniors taillent bavette. Un constat s’impose : le port du masque est de mise, même si beaucoup d’entre elles ont déjà reçu leurs doses du vaccin. Ibrahima Gassama s’est fait vacciner il y a 15 jours. Emmitouflé dans un pantalon noir sur une chemise blanche portant des rayures bleutées, cet enseignant à la retraite a été grandement impacté par le covid. «Je donnais des cours de renforcement à des jeunes qui venaient chez moi. Et malheureusement, avec la pandémie, j’avais peur de choper le virus. Dans l’entendement populaire, les jeunes étaient considérés comme des fossoyeurs. Donc, j’ai dû tout bonnement arrêter d’être en contact avec eux», souffle difficilement l’homme âgé de 65 ans. En décidant d’arrêter ses cours de renforcement, le sexagénaire a eu des difficultés pour boucler les fins du mois. «Je suis obligé de subvenir aux besoins de ma famille, payer leur scolarité et prendre en charge le loyer. C’était très difficile, mais grâce à Dieu, j’ai tenu bon» confie-t-il. L’arrivée du vaccin lui a permis de reprendre ses activités longtemps laissées en rade. «Je me suis récemment fait vacciner. Aujourd’hui, la psychose n’est plus là. J’ai repris les cours que je donnais aux enfants. Et, tout est redevenu normal. D’ailleurs, je ne fuis plus les jeunes. Ma vie a repris son cours normal», lâche le vieux Gassama, avec un sourire dissimulé derrière le masque de protection.

«Je me sens sauvée»

Tout comme Moustapha, Awa Diop a été récemment vaccinée dans une structure de la place. Depuis, elle tombe le masque. Pour cette dame, avant de sauter le pas, la psychose de la maladie faisait partie de sa vie. «J’étais terrorisée par la maladie, d’autant plus que je suis diabétique. Donc avec mon âge et ma comorbidité, j’étais une personne très exposée» explique la dame. D’ailleurs, avant la venue du vaccin Awa et son petit-fils s’étaient totalement confinés. «J’évitais les sorties inutiles. Je n’allais plus au marché, ni à certaines cérémonies, dont les mariages, baptêmes et décès. Je me contentais juste d’appeler au téléphone. Et, vu que j’habitais dans un immeuble au 1er étage, j’évitais même de descendre prendre l’air». Des précautions qui ne se limitaient pas uniquement à elle seule. «J’avais également confiné mon petit-fils de 15 ans. Il ne sortait pas de la maison. Et personne ne venait le voir. Le jeune homme carburait à la télé et à la tablette. J’étais ferme à ce propos, ma santé en dépendait», se rappelle la dame de 70 ans. Ses activités économiques ont également été fortement impactées. «Je voyageais pour acheter des produits à l’extérieur du pays, mais aussi dans la sous-région. Mais avec la fermeture des frontières à l’époque, je ne pouvais plus faire de commerce», confesse avec amertume la dame. Aujourd’hui, l’arrivée du vaccin a insufflé du renouveau dans sa vie. «Je l’attendais avec impatience et, aujourd’hui, je me sens sauvée. Avant je limitais mes sorties et là, je m’en donne à cœur joie. C’est tellement agréable de se sentir protégé», savoure-t-elle. N’empêche, la septuagénaire continue de respecter les mesures barrières. «Je porte toujours le masque. J’essaye également de respecter l’hygiène instaurée par les autorités sanitaires. En allant également à la mosquée, j’essaye de me mettre à l’écart du groupe», explique Awa. Car, pour elle se sentir protégé est une chose, ne pas transmettre le virus à d’autres en est une autre. Un sentiment partagé par Younouss Diop, retraité de 75 ans. «J’espère que ce vaccin va sauver des vies parce que ce fichu virus m’a pris un être cher», lance-t-il. Younouss a payé un lourd tribut. Un de ses meilleurs amis est décédé du coronavirus, il y a seulement deux mois. Entre le deuil et les restrictions, la situation n’a pas toujours été facile à vivre», reconnaît-il les yeux embués de larmes. Et, depuis la mort de son camarade, Younouss a décidé de durcir ses mesures. «Mon ami est mort car son jeune fils de 17 ans lui avait refilé la maladie. Ma maison était un lieu de rencontre des jeunes du quartier. Mais depuis la mort de ce dernier, j’ai interdit aux jeunes de venir chez moi pour faire du thé. C’est dur, mais il fallait que je me protège, j’avais très peur. Je ne sortais plus de chez moi et j’étais dans le désarroi. Je n’ai même pas pu aller aux funérailles de mon ami», confie tristement Younouss. Mais, ces restrictions drastiques sont un lointain souvenir. «Avec le vaccin, maintenant, je n’ai plus peur. Je n’ai plus cette épée de Damoclès car je me sais protégé» assure le septuagénaire. Les jeunes du quartier ont recommencé à fréquenter la maison. Même son de cloche pour Lamine Ndiaye. Malgré une migraine suite à sa vaccination, l’homme de 72 ans, se sent renaître. «Aujourd’hui, je revis. Mon bureau ne désemplissait pas. J’étais tout le temps en contact avec des gens qui ne portaient pas de masque. J’avais énormément peur». D’ailleurs, pour éviter des désagréments, certains de ses pairs d’âge avaient jugé nécessaire de rester chez eux et de ne pas venir au travail. Mais, après avoir reçu la dose de son vaccin Sinopharm, l’atmosphère est moins tendue. «On peut revoir sans crainte nos amis, enfants et petits-enfants.» Le bonheur de se retrouver après près d’un an de privations.

LOBS

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